Bassin Adour-Garonne
Agroécologie : où en est-on sur le bassin ?
#144
Présenté au comité de bassin du 11 décembre 2025, le rapport de mission Agroécologie dresse un état des lieux lucide et résolument constructif, de l’état de la transition agroécologique sur le bassin Adour-Garonne. Son message principal est clair : l’agroécologie progresse, mais lentement, et surtout de manière très hétérogène.
Une dynamique réelle, mais fragile
Les données analysées montrent des avancées tangibles : augmentation des surfaces en agriculture biologique, montée en puissance des Mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC), diversification accrue des assolements, progression légère des légumineuses et baisse des achats d’engrais par exploitation. Ces évolutions confirment une trajectoire engagée depuis une dizaine d’années .
Pour autant, certains indicateurs clés stagnent. L’usage global des produits phytosanitaires ne diminue pas significativement, même si leur nature évolue avec davantage de biocontrôle et moins de substances plus préoccupantes. L’agroécologie avance donc davantage par transformations progressives des pratiques que par ruptures franches.
Un objectif partagé… mais des chemins multiples
Le rapport met en lumière un point souvent sous-estimé : il n’existe pas une seule agroécologie, mais une diversité de trajectoires. Tous les acteurs interrogés s’accordent sur l’objectif – produire durablement en réduisant l’empreinte environnementale – mais divergent sur le rythme et l’ampleur des changements à opérer.
Cette pluralité explique en partie la difficulté à mesurer les progrès à l’échelle du bassin. Aucun indicateur unique ne peut rendre compte de la transition, tant les contextes liés au sol et au climat, les systèmes de production et les contraintes économiques diffèrent d’un territoire à l’autre
Le frein majeur : le risque économique
Le rapport souligne avec force un constat partagé par la profession agricole : le risque économique reste le principal frein à l’engagement. Dans un contexte de crises multiples – économiques, sanitaires et climatiques – changer de pratiques peut entraîner des surcoûts ou des pertes de rendement à court terme, alors même que les bénéfices environnementaux et agronomiques sont souvent différés.
C’est pourquoi la mission insiste sur la nécessité d’un accompagnement, non pas pour subventionner indéfiniment des pratiques, mais pour sécuriser les phases de transition et permettre aux agriculteurs de tester, apprendre et ajuster.
Des leviers identifiés pour changer d’échelle
Le rapport identifie plusieurs leviers structurants pour accélérer :
- le renforcement des démarches collectives territoriales, véritables moteurs de diffusion des pratiques ;
- la co-construction et la diffusion des connaissances, via des réseaux d’expérimentation et une meilleure capitalisation des résultats ;
- l’appui sur l’adaptation au changement climatique, qui rend de nombreuses pratiques agroécologiques incontournables ;
- le rôle clé des coopératives et des filières, capables de valoriser économiquement les pratiques vertueuses ;
- et enfin, des incitations financières ciblées, temporaires et orientées vers la prise de risque.
Un cap clair pour les années à venir
Plus qu’un simple diagnostic, ce rapport fournit une boîte à outils stratégique pour les prochaines années. Il confirme que le bassin Adour-Garonne dispose d’atouts majeurs – diversité des systèmes agricoles, dynamiques territoriales, mobilisation des acteurs – mais que l’accélération de la transition agroécologique passera par une action collective, coordonnée et pragmatique.
L’agroécologie n’est pas une promesse abstraite : elle est déjà à l’œuvre. Le défi est désormais de lui donner les moyens de changer d’échelle, sans fragiliser celles et ceux qui la mettent en pratique au quotidien.
Le rapport de la mission agroécologie a été rédigé par Lionel Alleto, Philippe de Guenin et Philippe Pointereau., missionnés par le Comité de bassin, en novembre 2024.